14. Fête des Mères 2022

Pour ma mère en Inde

Très chère Mamatha,

Récemment, j'étais dans tes environs,

Mon voyage en Inde n'a duré que deux semaines,

Trop court pour te localiser,

Mais assez longtemps pour honorer davantage ta culture.

Je pense toujours à toi, depuis des années et des années,

Maman, c'est toi que je désire ardemment.

Malheureusement, je ne t'ai pas encore trouvée,

Et pourtant, je le sais: je suis connectée à toi par l'âme.

Mon enfant intérieur a besoin de toi, tu lui manques,

Pendant certaines périodes dans mon corps, il y passe des tempêtes.

Maintenant, j'en suis au point où je veux vraiment te rencontrer,

Pour te sentir, te ressentir et réchauffer nos coeurs respectifs.

Cette lignée de femmes, je la ressens inconsciemment,

J'imagine ta mère touchant ton front avec amour.

Quand le moment viendra-t-il,

Quand me gâteras-tu avec un geste pareil?

J'aime voler vers mon pays natal,

Alors, j’absorbe tout,

Mon cœur est comme un panier à bascule rempli d'amour.

J'espère qu'un jour tu y atterriras en douceur.

J'aime aussi prendre l'avion pour rejoindre ma famille (en Belgique),

Mais ensuite, je dois généralement récupérer,

Je ne veux pas dire que je ne les aime pas.

Je descends, sur un terrain qui est un étranger à mon corps,

Même si j'ai grandi ici.

Et j'ai gambadé ici.

Ma connexion la plus profonde est dans le Bihar,

C'est là que sont mes racines et ma base.

Je fais tout mon possible pour maintenir mon équilibre.

Quelque part dans le district Muzaffarpur - Bihar

Chaque jour, je relève le défi, ma chère Mamatha,

Et j'espère silencieusement que toi aussi tu embrasseras la vie,

Et que ton manque ne paralyse pas ton cœur, comme c'est parfois le cas pour le mien.

Nous sommes unies, mais en même temps très éloigneés,

Nous ne faisons qu'une, je suis ta fille et tu es ma mère,

Je t'aime,

En ce jour de fête des mères, mon cœur se plie en trois,

(Pliage 1 -) Je t'aime tendrement,

(Pliage 2 -) Mon cœur a aussi beaucoup d'affection pour ma mère ici présente,

(Pliage 3 -) Chaque jour, bien sûr, j'ai des tas d'amour pour ma famille,

Mon mari, mes enfants, il n'y a pas de limite à l'amour que je leur porte.

De la tristesse empilée, mais aussi de l'amour en abondance,

C'est sur ces mots que je termine cette note,

Mamatha, où que tu sois, porte-toi bien.

Ta fille,

An Sheela x

13. Attérir (2)

Suite du texte précédent (blog 12)

En 2020, j'ai à nouveau voyagé avec des étudiants dans le sud de l'Inde. Une fois de plus, les récits de traitements injustes envers les parias (intouchables) m'ont énormément choqué. Comment se fait-il que mon cœur se soit déchiré lorsque j'ai entendu cette injustice? Etais-je moi-même une personne paria dans le passé, ou dans ma vie antérieure peut-être? Mon corps a-t-il absorbé l'injustice et l'a-t-il bien cachée dans mon subconscient? Nandhini et le père Suresh ont eu le plus grand mal à me ramener à la raison. Très bizarre, cette émotion inexplicable.

Le voyage de cette année était d'une nature différente. Grâce à mon cours de l'année dernière à l'AFC - Pays-Bas, j'ai appris à écouter mes sentiments et aussi à aborder et nommer certaines réactions violentes. J'ai expliqué à Iris autant que possible des signaux que mon corps me donne. Grâce à ces techniques, je suis partie en Inde de façon plus consciente. Je fonctionnais à partir de l'émotion, du cœur. Et Iris m'a donné la bonne mesure à chaque fois, elle s'est occupée de la vision réaliste et nos deux approches se sont combinées harmonieusement. Mon moment sur le pont (qui était apparu dans mon rêve), c'était un moment très spécial. Mais aussi la rencontre avec Lucky était si intense que mon corps a pris le dessus. Mais l'avantage est que cette fois, j'ai pu placer mes émotions. Je pouvais tout comprendre beaucoup mieux.

Le fait que je n'ai plus de date de naissance, que mon âge est faux, que mon nom a été changé et que les traces de mes racines ont été effacées en déménageant autant que possible dans mon pays de naissance, me travaille encore. À l'âge de plus ou moins 41 ans (je ne connais plus mon âge exact), devoir poser des questions sur qui je suis, quel âge j'aurais maintenant et où j'ai été pendant ces 1,5 à 2 ans dans toute l'Inde, cela affecte mon identité. Et tout est facile à dire: laissez tomber, soyez heureux de ce que vous avez, regardez devant vous plutôt que derrière vous... J'invite ces personnes à se mettre à ma place, et à se donner tant de mal pour découvrir ce qui est évident pour beaucoup de personnes. Cette fois-ci, je veux prendre le temps d'intégrer, de comprendre et de nommer les choses, afin d'apprendre à mon corps: c'est bon, je suis en sécurité avec moi-même. Parce que c'est exactement ça le problème de beaucoup d'adoptés: la sécurité avec soi-même… Comment apprendrais-tu à l'accepter? Personne ne m'en avais jamais parlé, jusqu'à l'année dernière à l'AFC Pays-Bas.ste (ik weet mijn exacte leeftijd niet meer), vragen moeten stellen over wie ik ben, hoe oud ik nu zou zijn en waar ik die 1,5 à 2 jaar overal in India heb gezeten, dat hakt in op mijn identiteit. En het is allemaal gemakkelijk gezegd: laat het los, wees gelukkig met wat je hebt, kijk vooruit in plaats van achteruit… Ik nodig deze personen uit om in mijn schoenen te gaan staan, en zoveel moeite te moeten doen om datgene te weten te komen dat voor zovelen evident is.  Deze keer wil ik de tijd nemen om de zaken wél te integreren en wél te begrijpen en benoemen, zodat ik mijn lichaam kan aanleren: het is OK, ik ben veilig bij mezelf. Want laat dat nu net het probleem zijn bij veel geadopteerden: veiligheid bij jezelf? Hoe zou je dat leren aanvaarden? Bij mij heeft nooit iemand daar een woord over gerept, tot vorig jaar bij AFC Nederland.

Quand je suis rentrée chez moi, ma tête était toujours en Inde et mon corps en Belgique. J'ai eu besoin de plus d'une semaine pour atterrir. Pour moi, l'atterrissage a une double signification: pays de naissance et pays actuel, mais aussi équilibre entre deux cultures. Si j'atterris dans une culture, je rate l'autre, et vice versa. Les adoptés internationaux doivent faire face à cette position dispersée. Et cela reste un exercice difficile. Cette fois, mon enfant intérieur voulait rester en Inde mais mon cerveau m'a dit: il est temps de rentrer en Belgique. J'ose dire qu'avec les outils que j'ai appris, j'ai réussi à surmonter cette dernière semaine assez bien. L'Inde s'est répercutée: dans mes rêves, dans mes mots, dans mes remarques (parfois dures)... Et même si j'ai pu toucher des gens négativement ou positivement en agissant ainsi, j'ai le sentiment de m'être enrichie psychologiquement. Je me sens plus complet grâce à la visite du district de Muzaffarpur. Et même si je n'ai pas encore retrouvé ma mère, cette pièce du puzzle a une valeur énorme. Même une mine d'or ne serait pas en mesure de couvrir cette valeur 😉.

Je tiens à remercier tout particulièrement les personnes suivantes, du fond du cœur, pour leur soutien inconditionnel et leurs encouragements:

  • - Mon mari et mes enfants, pour m'avoir laissé partir
  • - Iris Neels, ma compagne de voyage et fantastique amie d'enfance
  • - Renate, ma camarade de blog, pour tous ses conseils, aussi dans les heures tardives
  • - Mes amis et followers, pour leur enthousiasme et leur compréhension

PS: Maintenant que je n'ai plus de date de naissance, et que je ne suis plus fan du 22 août, date à laquelle j'ai toujours espéré que ma maman en Inde pense à moi, je cherche une alternative. Fêter mon anniversaire, c'est comme me mentir à moi-même. Je ne suis plus lié à cette date. Quels conseils avez-vous ou quel type de journée me conviendrait plus? Je vous invite à poster vos idées dans les commentaires!

12. Attérir (1)

Plus d'une semaine après mon voyage, j'ai trouvé le temps et le courage d'écrire une suite à mon blog. J'ai eu du mal à trouver mon équilibre pendant cette semaine. Comment cela se fait-il?

Les deux semaines que j’ai vécu intensément dans mon pays natal, où j'ai renoué avec mes racines, ont été les deux meilleures expériences que j'ai pu vivre en Inde jusqu'à présent. Meilleur dans le sens où je me suis rapprochée de moi-même et où j’ai pris le temps d'absorber et d'intégrer la culture et l'environnement. Comment s'y prendre? Qu'est-ce qui a rendu ce voyage différent des précédents?

Mon premier voyage en 2003 avec ma mère adoptive, était un voyage pour découvrir mon pays natal. J’ai dormi dans un hôtel pendant deux semaines et, pendant la journée, je sortais avec les sœurs pour explorer la ville et les environs au sud de Patna. C'était un pur voyage touristique, rien de plus. J'ai eu l'impression inexplicable de reconnaître le lieu de l'orphelinat. Mais je n’ai rien fait de cette information.

En 2004, j'ai effectué mon deuxième voyage, dans le cadre de mon travail. Avec des étudiants, j'ai soutenu une école pour intouchables (hors castes) dans le sud de l'Inde. Là-bas, je me suis faite des amis pour la vie. Nandhini et le père Suresh étaient très proches de moi, ma confiance en eux et leur confiance en moi étaient indéniables et il faudrait beaucoup de choses pour briser ce lien. Je suis très prudente quand il s'agit de nouveaux contacts. Mon cœur a déjà été brisé une fois quand j'ai dû quitter l'Inde (parce que je ne l'avais pas choisi moi-même, et qu'on m'a arrachée à ma base, à mes racines), quand on gagne ma confiance, c'est aussi avec conviction que je me "jette" dans ce contact. J'ai conservé ce mode de fonctionnement pendant des années.

Après 2004, j'ai choisi de ne plus me rendre dans mon pays d'origine, car je donnait la priorité aux soins de mes enfants. Je pense toujours que c'était un très bon choix, car ils méritent la fondation qui m'a tant manquée.

En 2018, je suis retournée en Inde pour la première fois depuis des années en compagnie de mon mari. Il s'agissait principalement d'un voyage touristique, mais avec une escale à l’orphelinat Nirmala Sishu Bhavan à Kolkata (le foyer pour enfants de Mère Teresa). J'étais tellement nerveuse, peu sûre de moi-même et effrayée en même temps, que j'ai laissé l'entretien se dérouler. C'est Sœur Marianne qui était responsable, elle n'a pas cédé d'un pouce à mes questions sur mon passé. Je devais laisser le passé de côté, car c'était la volonté de Dieu que j'aille en Belgique, quel enfant chanceux j'étais... Je n'ai pu que constater que mon nom avait été changé à l’orphelinat de Kolkata. Pour le reste, il n'y avait pas de place pour découvrir plus de détails sur mon passé. J'étais très frustrée à l'époque, mais je n'avais pas les outils pour parler à travers moi.

Vous pouvez lire la deuxième partie dans la prochaine publication.

11. Suis-je célèbre ou ai-je une réputation douteuse?

Voici le cadre actuel pour écrire ce blog : dans le hall des arrivées de l'aéroport de Mumbai, avec vue sur les arbres, le petit cafétaria Chai Point et le stand de Street Food. Nous attendons notre correspondance pour l'Allemagne.

C'est le moment idéal pour écrire la suite de mon blog. Nous avons atterri sans problème de Patna ce matin. J'ai complété mon journal dans l'avion, et je viens de répertorier tous mes contacts en Inde et de faire un récapitulatif des événements les plus importants de chaque jour.

Voici ce que j'ai envie de partager avec vous. Mardi dernier, nous étions à Muzaffarpur pour la deuxième journée consécutive. Là, nous avons pu parler au SDO, the Sub Division Officer. Cette personne a une fonction administrative importante et peut consulter les listes de résidents dans le cadre des élections. Le vote est obligatoire en Inde. Nous lui avons raconté notre histoire, par l'intermédiaire d'un ami interprète. Après la conversation, nous avons souri et pris une photo ensemble. Le SDO a promis de faire de son mieux pour nous aider, mais les vacances de Pâques entraîneraient un certain retard. Du jeudi saint au dimanche de Pâques, la plupart des Indiens travaillant dans l'administration sont en vacances. Nous nous sommes dit au revoir avec un bon sentiment.

Le mercredi 13 avril, nous sommes retournées à l'orphelinat pour la dernière fois. Nous avons dit au revoir à Lucky et aux sœurs. Ensuite, nous avons mangé un délicieux burger végétarien dans le McDonalds de la ville. Nous avons terminé la journée par une sortie en bâteau sur le Gange, le fleuve sacré du pays. J'ai apprécié la cet endroit paisible sous le coucher de soleil. C'était le moment idéal pour se souvenir du décès de mon amie Anne-Michèle. J'ai, symboliquement, jeté des cœurs en bois dans le fleuve sacré, en souvenir d'elle mais aussi comme un signe fort qu'elle était la première amie qui m'a accompagnée en Inde en 2004. Elle a pris mon pays de naissance tel qu'il était, avec ses côtés négatifs et positifs. Je lui en suis toujours reconnaissante. Et je porte toujours son chaleur dans mon cœur.

Le jour suivant, nous avons fait une pause. Nous avons relu toutes nos informations, discuté des progrès et structuré les derniers détails. Soudain, le message est arrivé que nous étions dans le journal. Mes intestins s'effritent, je me sens mal et des larmes de peur coulent sur mes joues. Je voulais surtout éviter de mettre ma mère en danger, car un enfant qui a été donné en adoption est encore souvent considéré comme tabou. Nos amis nous ont donc conseillé de mettre la recherche en attente. Pourtant, je ne voulais pas prendre de décisions aussi radicales. Pourquoi nos amis étaient-ils si méfiants ? Vous devez comprendre un peu la culture indienne. Il faut être prudent car les villageois vivent encore selon le système des castes. Ce système garantit que les gens vivent en fonction de leur rang et, par conséquent, pas mal de personnes des rangs supérieurs méprisent les rangs inférieurs. Chaque grade a sa tâche. Les villageois sont souvent très pauvres et n'appartiennent même pas à un rang. J'ai le sentiment d'appartenir à ce rang hors-caste, mais ce sentiment n'est peut-être pas exact.

Nous avons décidé de ne pas répondre à l'article mais nous avons exprimé notre mécontentement par le biais de nos contacts. Apparemment, un journaliste était présent à la rencontre avec le SDO, bien que nous ne le sachions pas. L'article dramatise plutôt ma recherche et me dépeint comme une dame très riche. Il est clair qu'un certain nombre de choses ne sont pas tout à fait correctes, mais cela n'est possible que parce que je n'ai parlé à aucun journaliste. Nous tentons aujourd'hui de rectifier ce manquement en rappelant aux responsables leur devoir : ils ont publié l'article dans les médias à notre insu. Ils doivent maintenant s'assurer que l'aide est fournie. Puis-je transformer cette notoriété en un résultat efficace ? Est-ce que je vais rester célèbre ou ai-je une réputation douteuse dans le Bihar?

10. Don’t give up

Aujourd'hui, j'écris ce blog avec des sentiments mitigés. Mais ma persévérance a un creux. Heureusement, j'ai des gens gentils autour de moi. Ils me soutiennent, et continuent les recherches avec moi. Cette semaine a été très spéciale : découvrir l'environnement , découvrir le quartier de Muzaffarpur, ressentir beaucoup avec un peu d'espoir (sans désespérer).

Lundi nous sommes allés chez les sœurs à Muzaffarpur. Avec elles j'avais l'impression de rentrer à la maison. Nous avons été chaleureusement accueillies et avons reçu un délicieux repas. Le sourire chaleureux des sœurs là-bas m'a touchée. Bien qu'elles m'aient conseillées de ne pas chercher, je pouvais sentir qu'elles se soucient de moi. Je suis toujours leur fille. Je leur ai expliqué du mieux que j'ai pu ce que je ressens et pourquoi je fais cette quête. J'ai l'impression d'avoir vécu 40 ans de façon "incomplète". C'est ça qui me pousse à ne pas baisser les bras.

Nous sommes passés devant un village local, qui peut avoir un lien avec moi. J'ai un goût étrange dans ma bouche et je suis immédiatement tombée amoureuse du paysage : des champs, de nombreuses verdures, quelques huttes et parfois des maisons plus modernes. Je remarqua qu'Iris était regardée. Elle se sentit inconfortable. Je lui ai précisé que ce sentiment m'a poursuivi depuis 40 ans en Belgique. Pas mal de personnes se sont adressées à moi à base de ma la couleur de peau, ce n'était pas une bizarrerie. Plus loin, nous avons traversé un pont. Nous nous sommes arrêtés un instant et mon corps a réagi : jambes tremblantes, mon rythme cardiaque s'est envolé. Est-ce que mon corps savait que j'étais ici toute petite ou est-ce que je m'imaginais ça ?

Par l'intermédiaire d'un prêtre, nous sommes entrés en contact avec une dame qui pourrait être ma mère, même si le nom ne correspondait pas à 100 % . J'ai pensé que cela valait la peine d'essayer. Nous avons monté une scène : la dame en question était invitée à un endroit neutre, donc nous ne sommes pas allés chez elle. Dans un endroit neutre, un riverain a engagé une conversation avec elle. Nous l'avons attirée avec une excuse : elle recevrait un sac de nourriture. Je passais 'par accident' et la regardait un instant. J'ai remarqué immédiatement que ce n'était pas la dame que nous recherchions. Elle est partie quelques instants plus tard avec un sac de riz sur la tête. Grâce à moi elle avait encore de la nourriture pour quelques jours.

Mon cœur s'est serré un instant, même si je sais qu'un résultat immédiat n'est pas évident. Je suis allée dormir avec les sentiments partagés. Demain il y aura un nouveau jour. Je n'abandonne pas.

9. L'Arbre Bodhi

Jusqu'à présent, je n'ai pas révélé grand-chose sur ma recherche. Nous ne restons pas inactifs, nous nous consultons régulièrement et établissons des contacts avec la population locale. Nous avons dû faire appel à ces contacts immédiatement, car le jour de notre arrivée, notre hôtel n'était pas disponible en raison d'un problème administratif. Par nécessité, mais rétrospectivement tant mieux, nous logeons maintenant chez mes connaissances. Nous sommes tellement choyées ici qu'au lieu de perdre du poids, je pense que je vais reprendre quelques kilos : chapattis, papadums, fruits frais, biryanis, ... La cuisine authentique caresse nos papilles..

Lors de notre première visite à l'orphelinat, nous avons été autorisées à consulter le registre, mais on ne nous a donné que la page où j'étais mentionnée. La soeur responsable de l'orphelinat nous a probablement aussi donné la signature de ma mère. Sur la base de cette signature, nous essayons de déchiffrer le nom du lieu. Nous hésitons actuellement entre deux villages. Mais c'est un véritable défi de trouver une structure dans la structure de l'État du Bihar. L'État est divisé en districts, blocs, panchayats, puis nous arrivons aux villages.

Nous sommes donc toujours en train de chercher dans le Bihar. Entre-temps, je me rends compte de plus en plus que si vous voulez chercher votre famille, il vaut mieux aller sur place. Nous travaillons avec des personnes fiables, et le contact personnel aide certainement. Nous sommes très prudents dans nos déplacements, car la région ne se développe pas facilement. Iris et moi sommes toujours en compagnie. Nous voyageons avec des amis ou avec une sœur de l'orphelinat. Nous constatons que la tension entre les religions reste présente, bien que cachée.

Entre les deux, nous trouvons aussi le temps de faire un peu de tourisme. Hier, nous avons visité Bodhgaya, l'endroit où le Bouddha a eu son moment d'illumination il y a 2500 ans sous l'arbre bodhi. Il nous est donné une feuille de cet arbre. Ça porterait chance... Le vieux temple est entouré de beaux jardins. Bouddha utilisait ces jardins pour sa méditation. C'est aussi effectivement un endroit reposant, pour la première fois depuis une semaine je peux apprécier le chant des oiseaux. Mes pensées vagabondent là, ... vers les 2 villages possibles d'où j'aurais pu venir, vers Lucky, vers mon moi intérieur.

Ce qui a été caché en moi pendant 40 ans a maintenant la chance d'apparaître à nouveau, petit à petit. A suivre...

8. Lucky

Nous sommes en Inde depuis plusieurs jours. Je me sens très heureuse, même si je dois encore m'habituer à la circulation ici à Patna : pousse-pousse, motos, bus, cyclistes, piétons, ... tout le monde se déplace en se croisant. Nous traversons la ville avec les klaxons inessants. Un klaxon est plus fort que l'autre.

Nous logeons chez des amis et grâce à ces amis nous avons obtenu un rendez-vous à l'orphelinat. Quand j'arrive, je suis perdue durant un moment : je ne le reconnais plus du tout. L'ensemble du site a été rénové, seule l'ancienne chambre de Mère Teresa est encore debout.

Nous rencontrons la soeur respnsable et nous faisons une visite. À l'heure actuelle, il y a principalement des enfants ayant des besoins spéciaux et des femmes souffrant de retard mental. Je prends le temps de saluer tout le monde, c'est la moindre des choses que je puisse donner aux patients : leur faire sentir qu'ils comptent.

Avec une seule femme, le contact est très particulier. Quand je la rejoins, elle attrape mon bras à deux mains et ne me lâche pas. À l'improviste, elle dit: "Salut soeur Sheela". Je ne sais même pas où je l'ai vue. Elle se met à pleurer et mon corps réagit automatiquement. Un lien spécial se manifeste sous la forme d'une immense affection, compréhension et amour qui coule de l'extérieur l'un vers l'autre. Je n'ai littéralement plus de force et j'ai besoin de récupérer. La sœur et Iris, toutes deux témoins de ce moment particulier, sont profondément touchées.

Aujourd'hui, 3 jours plus tard, je ressens le besoin de revoir Lucky. Je retourne à l'orphelinat avec mes amis de Chennai.

Lucky et moi tombons dans les bras l'une de l'autre en pleurant, puis nous restons assis pendant une heure à nous regarder et à parler. Nos mains sont entrelacées. Un beau geste d'une situation qui montre qu'elle et moi étions ensemble à l'orphelinat il y a 40 ans. Moi en tant que toute petite et elle en tant qu'adolescente. Je n'ai jamais ressenti une telle connexion. Et si un jour je rencontrerais ma première mère, que sentirais-je? Ma connexion avec Lucky vient du plus profond de moi, c'est peut-être une bonne préparation pour ce qui va arriver. Chanceuces ou pas, nous continuerons ce défi !

7. Immersion

Me voici avec mon premier rapport.
Important: Nous sommes bien arrivés !


Photo : Arrivée à Patna

Mais le voyage a été semé d'embûches.
Outre la tension que j'ai ressentie en me levant et les adieux déchirants à mes enfants (et avec mon chien), nous sommes arrivées à l'heure à l'aéroport de Zaventem. Peu de temps après, Iris nous a rejoint avec son mari. Nous vérifions tout et donnons à nos maris respectifs un autre gros câlin. J'entre fermement dans la zone de sécurité. Tout se passe bien et nous sommes à la porte bien trop tôt. Nous prenons un autre verre au Starbucks puis décidons d'attendre notre premier avion pour Francfort. Notre premier défi est de relativiser un retard de 1h30. Quel challenge! Quand nous arrivons à Francfort nous sprintons comme de vrais athlètes du Terminal A au B. Haletant nous arrivons au comptoir de l'avion pour Mumbai. Au début, nous pensions que nous allions rater le vol. Finalement, notre avion part pour Mumbai avec 2h30 (!) de retard. Nous regardons tout du bon côté et prenons les choses comme elles viennent. Nous arrivons à Mumbai à 3 heures du matin le 3 avril. Nous passons l'immigration avec une certaine appréhension vers 4h du matin (nous avons le prochain vol à 5h45). Nous attendons,en vain, nos valises à la livraison des bagages. Nous levons les yeux au ciel et nous nous adressons au personnel. Nous sommes dans l'obligation d'engager une procédure pour déclarer les bagages perdus. Cette procédure prend 45 minutes. Après cela, nous devons encore passer la sécurité, nous enregistrer auprès d'Air India et nous rendre à la porte. Mais avec un abandon total, nous avons de nouveau sprinté avec nos corps fatigués. Après une nuit sans sommeil, nous pouvons nous asseoir dans l'avion en sueur sur nos sièges depuis notre vol vers l'Inde. Je suis trop contente de mettre les pieds à Patna. Mes jambes tremblent, mes cheveux volent au vent et mon corps me dit : tu es au bon endroit...

Avec Iris à mes côtés, je sens soudain mes forces revenir. L'énergie de ma patrie me stimule. Je suis impatient de relever les défis qui se présenteront à moi au cours de ce séjour. Je suis prêt pour l'immersion totale.



Photo : Vue d'une belle terrasse à Patna

6. Mon rêve: réalité ou fiction?

Samedi, 26/3/2022

Dans 1 semaine, 7 jours, 173 heures, 10000 minutes et environ 600000 secondes, je remettrai les pieds en Inde.

Via Mumbai, Iris et moi, nous rendrons à Patna (dans le Bihar). Le dimanche 3 avril, dans la matinée, nous atterrirons dans l'état où se trouve mon premier orphelinat pour enfants où j’ai été.

L'excitation monte, tout comme l'envie de partir. Après le décès de ma meilleure amie, Anne-Michèle, il m'a fallu des semaines pour exprimer la plus grande tristesse. Je n'arrivais pas à structurer mes pensées, j'avais du mal à me souvenir des informations et il était extrêmement difficile d'organiser un emploi du temps. Heureusement, je pouvais compter sur des personnes fantastiques autour de moi, qui comprenaient mon profond chagrin, qui m'emmenaient manger au restaurant, et surtout: qui respectaient mon rythme. Perdre Anne-Michèle, c'est comme perdre une grande partie de moi-même. Même si je savais que sa maladie ne pouvait être guérie, le fait d'avoir tout donné pour elle pendant 18 mois m'a d'abord rassuré car je n'avais rien à me reprocher. Deuxièmement, l'effet sur mon corps et mon cœur ne devait pas être sous-estimé.

Mais aussi grâce à elle, j'ai maintenant un nouveau défi: ma recherche de la vérité, ma recherche de ma famille.

Depuis toute petite, je rêve de l'Inde, je rêve de rencontrer ma famille, ma mère indienne qui m'a portée pendant neuf mois et m'a donnée la vie. Pendant des années, j'ai vécu dans “une cloche”: dans le mode de vie européen, la culture belge qui ne correspond peut-être pas à 100% à mon vrai moi, mon moi qui a été partiellement caché dans le subconscient. J'étais la première personne de couleur de mon village, j'ai avalé de nombreuses remarques sur mon apparence. Mais je ne pouvais pas paraître faible: je n'ai donc pas réagi et me suis adaptée, toute ma vie. La An que vous avez appris à connaître n'est pas tout à fait la même que la An Sheela d'aujourd'hui. Le besoin de me connecter réellement avec l'Inde prend de plus en plus place. Même si je suis consciente que cette mission n'aboutira peut-être pas encore au résultat souhaité, je suis déterminée à aller le plus loin possible. Et avec Iris à mes côtés, je suis sûre que nous franchirons de nombreuses étapes importantes.

Iris et moi allons partir sans programme détaillé. Nous verrons sur place quelles informations nous obtiendrons et quelles mesures nous prendrons. Entre-temps, nous voulons prendre le temps de visiter Bodhgaya et Nalanda, entre autres. Nous essaierons de vous tenir informés de nos aventures par le biais de ce blog, même si nous ne sommes pas sûres d'avoir un accès facile à Internet.

Pour ceux qui me suivent et qui ont lu mon texte précédent sur mon rêve: j'ai vraiment fait ce rêve, ce n'était pas une simple histoire. Grâce à Saartje, qui m'a sérieusement guidée pour rendre la perte d'Anne-Michèle plus supportable, j'ai reçu quelques explications sur mon rêve. Mes yeux se sont écarquillés lorsque j'ai découvert toutes les explications qu'elle a données. Je vous laisse la liberté de vous faire votre propre idée de ce que j'ai vécu dans mon subconscient et de la signification que cela peut avoir :

  • L'avion: représente une recherche de liberté psychologique, l'ascension vers une nouvelle façon de penser.
  • Le retard dans le départ de l'avion: le temps n'est pas encore totalement mûr pour cette transformation psychologique.
  • Escaliers: font référence à un effort:
    • Vers le bas : retour dans le passé
    • Vers le haut : vouloir améliorer les choses
  • Le verre: c'est la frontière entre l'au-delà et la vie ordinaire.
  • Poissons: connexion avec l'émotionnel mais aussi avec le côté sage de vous-même, ils sont aussi un symbole de prospérité.
  • Flash de lumière: symbolise le développement de l'intuition ou de la perspicacité.

Que pensez-vous de cette analyse? Qu'est-ce que vous me souhaitez?

Après 40 ans, aller enfin vers ce dont je rêvais mais que je n'ai jamais osé dire, c'est une victoire en soi pour moi!

Remerciement:

J'ai écrit ce texte avec l'aide de Coline Fanon (traduction) et Saartje Verhoest (analyse de mon rêve).

Je tiens à remercier ma Mimi (Anne-Michèle) pour tous les textes précédents, elle m'a accompagné pour lancer tout ce qui concerne mon adoption, elle a passé des heures et des heures à m'écouter et à m'encourager. Elle a patiemment relu toutes mes traductions. Avant son décès, elle a contacté Coline pour prendre la relève. Je n'en savais rien. Jusqu'au jour où je lui ai demandé de vérifier mes traductions. Des larmes ont coulé sur mes joues lorsque j'ai entendu qu'elle s'acquitterait de cette tâche avec dévouement, car Mimi s'en était déjà chargée. Coline ne le ferait que si je le lui demandais. Le destin a-t-il aidé ici? En bref, Anne-Michèle est une amie qui a parcouru un long chemin avec moi. Et elle restera dans mon cœur pour toujours, reconnaissante pour tout ce qu'elle m'a apporté. Mon étoile scintillante, 4-ever.

5. Un rêve spécial

Ce texte est dédié à Anne-Michèle, ma meilleure amie. Elle a quitté la terre récemment après un long combat contre le cancer…

Ma chère Mimi, ma BFF,

Après une nuit agitée, je me suis réveillée ce matin, couverte de sueur.

Quel rêve étrange j'ai fait…

Ma collègue Laura m'avait emmenée à Rome, pour me changer les idées après ta mort, Mimi. Sa famille et la mienne sont montées dans l'avion. L'aéroport était un bâtiment avec plusieurs étages et avec des murs qui dépassaient. L’architecture me faisait penser au style d'Ensor. J'avais l'impression de voler dans le bâtiment, une sensation bizarre.

L'avion a été retardé. Pas très agréable quand on sait que le bébé de Laura n'avait que quelques mois. Mais nous sommes finalement arrivés en toute sécurité dans un immense parc de vacances. Nous nous sommes retrouvés dans un immeuble avec des escaliers en verre. Notre appartement était spacieux, mais il y avait aussi de nombreux escaliers entre les différents espaces de vie.

Je suis passée d'une pièce après l'autre et les enfants se sont installés. Puis nous avons décidé d'aller dehors. Nous sommes allés parmi les gens. J'ai ressenti la pression des personnes qui m'entouraient, mais je n'ai pas pu déterminer quelle pression exactement. Nous sommes allés manger quelque chose dans un restaurant, puis nous avions continué à explorer la région. La disposition du parc était très variée: une plage que l'on pouvait atteindre par des escaliers, mais où des niveaux intermédiaires permettaient aux touristes de se détendre autour d'un jacuzzi ou d'un sauna. Plus bas, les escaliers se séparent et nous pouvions choisir de marcher plus loin vers la plage ou de retourner à la route principale du parc.

J'avais perdu la notion du temps et nous allions prendre un verre. Nous avons même fait un pas sur la piste de danse. Puis tout le monde est allé dormir. J'ai souhaité une bonne nuit à Laura. Mais elle m'a quand même invitée à jeter un coup d'œil dans son appartement. C'est comme si un nouveau monde s'ouvrait à moi. A l'intérieur, il y avait un nombre énorme d'aquariums. Des modèles larges, longs, hauts, grands et petits ornaient l'appartement. J'étais en pleine admiration devant tant de beauté, car je sais que toi aussi, Mimi, tu aimais les poissons dans ta décoration. Mais toi, tu préférais des poissons décoratifs non-vivants, parce que tu étais d’avis que maintenir un aquarium demandait trop de travail. Je suis partie en me sentant légère et satisfaite, prête à passer une nuit paisible. Mais rien n'était plus éloigné de la vérité: je me tenais devant mon appartement, et j'ai rapidement jeté un coup d'œil à la porte de l'appartement de Laura. C'est comme si cette porte s'était soudainement ouverte et que son appartement était apparu à côté de mon escalier en verre. L'appartement s'est agrandi en hauteur, il y a eu des aquariums supplémentaires, tout était baigné d'une énorme lumière. C'était toi, Mimi? Est-ce que ton âme m'a illuminée à ce moment-là? J'ai profité du moment et j'ai tout absorbé: ta force, ta lumière, ta foi en moi. Le chant angélique s'est estompé, tout comme le flash de lumière. Maintenant, j'étais prête à aller dans ma chambre. J'ai ouvert la porte et je suis tombée sur une pièce remplie d'animaux. Il y avait une branche épaisse avec de nombreuses branches latérales. Sur chaque branche latérale dormait un bébé chaton. Qu'est-ce que c'est encore? J'ai à peine osé les toucher, car mes bras étaient guidés par toi, Mimi. Et comme tu détestais les chats, je ne pouvais pas me permettre d'en caresser un. J'ai laissé le gigantesque arbre d'intérieur pour ce qu'il était et j'ai finalement réussi à me glisser dans mon lit. Pourtant, je n'arrivais pas à dormir et je suis retourné à la cuisine pour boire un verre. L'arbre d'intérieur avait disparu mais maintenant mon appartement était rempli de chiens. Tous ces chiens couraient dans tous les sens. Ils n'ont pas fait de bruit, ils n'ont pas aboyé mais leurs yeux fixaient le néant. J'ai caressé certaines de leurs têtes et j'ai pensé que c'était tellement triste pour eux d'être enfermés dans un appartement. J'ai ouvert la porte et ils ont tous couru vers la liberté. Avec un sentiment de soulagement, je me suis replongée sous les draps et oui, je me suis endormie.

Le lendemain, après le petit-déjeuner, ma famille et la famille de Laura sont retournées au parc. Nous voulions aller dans la zone où vivent les animaux. En descendant, Laura avait accidentellement laché son landau. Le landau a dérapé sur la pente mais personne sur le chemin ne l'a attrapé. J'ai paniqué et j'ai couru après, mais mes jambes n'ont pas vraiment coopéré. Finalement, j'ai atteint le bas de la pente et j'ai vu une dame prendre un landau, sortir l'enfant et s'éloigner. Ma tête était comme court-circuitée: cette dame allait-elle voler l'enfant de ma collègue? Oh mon Dieu! Je ne pouvais pas laisser faire ça. J'ai couru vers la dame, mais elle avait disparu dans la zone des animaux. Haletant, j'ai réussi à la prendre par le col et à la retourner. La dame blonde m'a regardé, stupéfaite. Le bébé dans ses bras était le sien, mais la fille de couleur qu’elle avait à sa main m'a fait signe. Un sentiment étrange m'envahit. Est-ce que je rêvais, ou est-ce que mon corps me disait que quelque chose n'allait pas ici? Le signal de la fille a traversé tout mon corps: "Je ne veux pas être ici en ce moment-même, cette dame m'a emmenée contre mon gré...", rayonnait la fille. J'ai serré la main de la fille et nous avions immédiatement eu une connexion. J'ai estimé qu'elle avait environ 7 ans. J'ai gagné sa confiance et lui ai dit que j'étais adoptée et que j'avais le sentiment qu'elle l'était aussi. Mawanesha a confirmé mon sentiment. Elle a été adoptée d’Inde. D'où le lien avec ....

J'ai négocié avec la dame blonde et j'ai été autorisée à emmener Mawanesha à la cafétéria pour lui parler. Un peu plus loin, j'ai choisi une table avec la fille. Nous avions siroté nos verres et pendant un moment, deux secondes, j'ai fermé les yeux tandis que nous faisions tinter nos verres ensemble. Un tourbillon a soudainement tourné autour de nous et nous a souleveés. Quand j'ai réouvert les yeux, j'étais dans le restaurant de la veille. Mawanesha avait disparu et j'ai regardé autour de moi, inquiète. En face de moi, j'ai vu un couple qui pleurait. Je me suis approchée d'eux pour les réconforter et leur demander s'ils avaient rencontré Mawanesha par hasard. Ils ont commencé à sangloter encore plus fort, ainsi que leurs enfants. J'ai posé d'autres questions et la dame aux cheveux courts s'est confiée à moi: notre enfant adopté a disparu et nous avons lancé un appel. Mais beaucoup de gens ne voulaient pas nous aider, ils nous reprochaient de croire en l'adoption et de vouloir prendre soin d'un enfant d'un autre pays. Ils nous ont même grondés.

Mon corps a vacillé, car mon histoire d'adoption n'est pas facile non plus, et tu le sais, Mimi. J'ai rassuré le couple et les enfants et leur ai promis de participer aux recherches. Ma recherche de Mawanesha s'est poursuivie pendant plusieurs heures. Finalement, je l'ai retrouvée dans l'espace réservé aux animaux, tapie en boule dans un coin?. Je l'ai prise dans mes bras et nous nous sommes serrées l'une contre l'autre jusqu'au crépuscule. Elle m'a dit qu'elle avait sept ans. Qu'elle avait des parents adoptifs qui voulaient bien s'occuper d'elle, mais avec lesquels elle n'avait pas de lien complet. Que la dame blonde était une de ses tantes et qu'elle se languissait tant de sa mère en Inde. J'ai pleuré avec elle, un profond chagrin est remonté à la surface, et nos larmes de manque se sont mêlées en gouttes épaisses. La rivière qui s'est formée a coulé jusqu'en Inde et s'est unie au Gange. Nous étions en train de flotter dans un bateau sur cette rivière sacrée. Le bateau est resté coincé dans l'un des méandres et nous avons mis pied à terre. Main dans la main, nous avions marché jusqu'à un petit village plus loin. Nous avions très soif et très faim. Les huttes étaient construites autour d'une place centrale. Nous avons traversé la terre battue et avons été automatiquement (par une force spéciale?) conduites à l'une de ces huttes. Une vieille dame avec de beaux cheveux longs et gris et des mèches noires est venue vers nous. Nous avons volé dans les bras de cette dame gracieuse. Je l'ai sentie, je l'ai sentie, je devenais une avec cette femme. Mawanesha faisait également partie de ce câlin, car elle était mon enfant interne que j'ai enfin pu lâcher.

Ma très chère maman en Inde, je t'aime. Ma très chère meilleure amie, Mimi, je t'aime. Ces deux amours, et l'amour de mon mari, me font prendre conscience que différentes formes d'amour m'apportent l'équilibre. L'amour reste, toujours.

PS: Ma collègue Laura avait retrouvé son bébé et son landau, sains et saufs.

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