34. Ambassade de Belgique – 28/2/2024

Ce matin, je me suis réveillé tôt. La visite à l'ambassade de Belgique est prévue à 11 heures. Je me prépare tranquillement, je prends mon petit-déjeuner, je vérifie si j'ai tous les documents nécessaires et j'appelle ensuite la réception pour réserver un taxi.

10 heures précises, je suis en bas. Je demande mon taxi mais il n'est apparemment pas encore arrivé. Le réceptionniste de l'hôtel contacte un taxi et 10 minutes plus tard, je peux partir. En chemin, je bavarde brièvement avec le chauffeur. 

À l'ambassade, je suis immédiatement conduit à l'intérieur. Le personnel est particulièrement sympathique et j'attends dans le siège d'où j'ai une vue sur les portraits du Roi Philippe et de la Reine Mathilde. 

À 11 heures, je suis conduit dans le bureau de l'ambassadeur. Le consul est également présent. Je m'étais entretenu avec lui auparavant en ligne pour expliquer la raison de ma visite.

L'entretien se déroule bien. J'explique les étapes de ma recherche et montre quelques photos pour illustrer mes propos. J'explique également la théorie des 3 A : distance – adoption – autonomie* (note de bas de page à la fin de cet article). En tant qu'adopté, tu peux te sentir pleinement à l'aise dans ta peau si tu peux accepter l'histoire de ton abandon et de ton adoption. Pour moi, ces 3 mots sont un énorme soutien. Je leur dis aussi que je suis déjà passé par CARA (Central Adoption Authorities) pour faire enregistrer officiellement ma recherche. J'ajoute qu'un nouveau rendez-vous avant mon départ pour Kolkata ne ferait pas de mal, juste pour montrer que je ne lâche pas ma recherche et aussi parce que je veux souligner l'impact de l'adoption. Nous avons également abordé des thèmes tels que le déracinement, la crise d'identité qui survient souvent à un âge plus avancé, la difficulté de se connecter à une culture que l'on ne connaît pas, la perte de la langue maternelle, le contact avec d'autres personnes qui ont vécu la même chose, etc. J'ai le sentiment que l'ambassade a compris mon message. Ils ne peuvent malheureusement pas accompagner les recherches individuellement, ce n'est pas leur rôle. Mais je suis soulagé qu'ils aient voulu écouter mon histoire, afin que les recherches en Inde soient mieux comprises à l'avenir. C'est peut-être une goutte d'eau dans l'océan, mais chaque petit pas est important pour moi. Je continue à grandir en tant que personne et je vis ce défi comme une mini-victoire. Je me rapproche de plus en plus de moi-même et j'espère qu'un jour j'arriverai à un point où je me sentirai suffisamment complet pour accepter tout cela.

Avant de quitter le bâtiment, j'offre un cadeau à l'ambassadeur. Le livre "Beyond Transnational Adoption" restera l'ouvrage de référence vers lequel on pourra toujours se référer à l'avenir. Il s'agit de garder le doigt sur le pouls. Le consul m'accompagne jusqu'à la sortie et promet que nous resterons en contact. Je suis soulagé et je me souviens d'une bonne conversation.

Je sors et je fais arrêter un auto-rickshaw. En montant, je me tords la cheville. Est-ce un message de l'univers me disant que je dois encore ralentir mon rythme ? À l'hôtel, je demande de la glace. Je vais être cloué au lit pendant quelques heures en espérant que l'enflure diminue. Tout est une question de temps : mon entorse, mais aussi ma recherche, et même si je préférerais un résultat immédiat, il est nécessaire d'intégrer chaque étape pour parvenir à une conscience plus profonde. C'est ainsi que je le vis et comme je l'ai déjà dit à une amie : j'avance peut-être lentement, mais je suis fier de la personne que je suis devenue entre-temps. Je suis fière de pouvoir me dire Bihari, je suis une reine indienne. 

Cette œuvre d'art était accrochée au mur de l'ambassade : mon vrai visage était également caché, pendant des années, mais maintenant je ne peux qu'être fière de ce que je suis devenue et de ce que je deviendrai encore. La croissance personnelle donne de la force. Je tiens à cette force.ast.

Je remercie déjà toutes les personnes qui me soutiennent pleinement, qui ont contribué à faire de moi la personne que je suis aujourd'hui. 

*Distance – adoption – autonomie : cette théorie a été élaborée par Hilbrand Westra, adopté de Corée du Sud, Sr Coach en adoption et spécialiste de la conscience systémique (https://alfa-omnia.com/hilbrand-westra/)

33. New Delhi – 27/02/2024

L'hôtel est un 3 étoiles, simple mais correct. Je dors dans un lit double et je replie la couverture en deux sur moi car les nuits sont assez fraîches. Hier soir, j'ai eu du mal à m'endormir à cause des hurlements de quelques chiens errants.

Le personnel de l'hôtel est sympathique. Je les dérange régulièrement pour commander le petit-déjeuner ou pour demander du papier toilette (les rouleaux de papier toilette sont assez petits ici). Il n'y a pas de restaurant rattaché à cet hôtel, mais ils proposent une livraison de nourriture et de boissons 24h/24 et 7j/7. C'est une autre façon de faire que ce à quoi je suis habituée, mais je m'adapte. 

Ce matin, je suis réveillée par le roucoulement des pigeons et le chant d'une espèce d'oiseau que je ne connais pas. Je vais à la salle de bain et j'ai de l'eau chaude pour une fois : alléluia ! Je décide de me laver les cheveux au-dessus de la grande bassine. La douche ne donne que de l'eau froide, donc je la laisse tomber. 

Je commande une omelette avec du pain et un thermos masala chai (thé). Cela soulage un peu ma gorge sèche. Aujourd'hui, je vais chercher des pastilles supplémentaires pour la gorge et du sérum physiologique pour me déboucher le nez. 

Je sens que mon corps a besoin de repos, je décide de remplir mon journal et je reste à l'intérieur ce matin. Les maux de ventre qui surviennent m'empêchent de partir tout de suite.

Je me repose bien et décide vers 14h de quitter l'hôtel pour relever un nouveau défi pour moi : prendre le métro. Et c'était bel et bien une aventure. En entrant, mon sac a été scanné, puis je me suis perdue dans les correspondances de métro, beaucoup de choses étaient indiquées en hindi. La dame de la sécurité m'a expliqué qu'il existe une application pour trouver plus facilement les stations de métro. Je l'ai tout de suite installée sur mon téléphone, quel soulagement ! Mais il a fallu continuer à chercher les lignes de métro correspondantes. A la station de métro New Delhi, j'ai dû acheter un nouveau ticket, ce que je n'ai réalisé que lorsque je n'ai pas pu passer le portique avec le ticket actuel. Finalement, je suis sortie vers 15h à la station Kalaji Mandir, où se trouve le magnifique temple du Lotus, un joyau au cœur de la ville animée. Je me laisse porter par la foule et je suis impressionnée par l'eau qui entoure le temple du Lotus. A l'intérieur aussi, le temple respire la paix. 

En sortant, je m'assois sur un banc. Des touristes germanophones m'abordent et me demandent pourquoi je suis en Inde. Nous discutons un peu puis nos chemins se séparent. Je retourne ensuite à la station de métro. J'arrive en métro super rapide à Aerocity, c'est la ligne de métro la plus moderne de la ville. 

Avant de retourner à mon hôtel, je m'arrête à une pharmacie : j'achète un spray nasal, des pastilles pour la gorge et une grande boîte de mouchoirs. J'espère qu'avec cet arsenal, je pourrai vaincre les microbes.

32. New Delhi – 26/02/2024.

CARA

Il est difficile pour moi de me déplacer seule lors d'une journée aussi excitante qu'aujourd'hui. Mon cœur bat à tout rompre. Aujourd'hui, je veux que CARA (Central Adoption Resource Authority) prenne enfin en charge mon dossier et soutienne activement ma recherche en Inde. Je n'ai pas pu obtenir de rendez-vous officiel, bien que j'en aie informé l'ambassade de Belgique au préalable. Je n'attends pas l'e-mail de confirmation et je me rends aux autorités centrales d'adoption de l'Inde.

J'arrive en autoriksja et en chemin, nous demandons à plusieurs policiers où se trouvent exactement les bureaux de CARA. Derrière un bâtiment de l'armée, le panneau de CARA se dresse.

Je paie le chauffeur de riksja et me dirige vers les escaliers. Au premier étage, j'arrive à un premier bureau, un employé du secrétariat passe un appel téléphonique après que je lui ai expliqué pourquoi je suis là. Un autre Indien vient me chercher et me conduit à un bureau plus loin dans le bâtiment. En chemin, nous passons devant une cour intérieure où plusieurs écureuils se balancent dans les arbres. Le reste de l'environnement me passe devant les yeux car je ne veux qu'une chose maintenant : attirer l'attention sur ma recherche au niveau gouvernemental.

On me fait asseoir dans un fauteuil et j'observe attentivement les environs. Sur le mur, il y a un cadre avec le mot "Famille" découpé dans du bois au centre. Dans le cadre, je trouve des photos d'enfants blancs et noirs, vraisemblablement de familles blanches qui ont adopté des enfants indiens. À gauche de ce cadre, il y a un panneau avec les mots CARA, sécurité, famille et espoir. Sur une table à côté de moi se trouve une grande sculpture en verre avec 2 cygnes et 1 petit, comme si cette œuvre d'art aux accents chinois devait éveiller le sentiment familial. De fausses fleurs blanches agrémentent l'ensemble. À gauche de moi, il y a encore un salon et à côté, je vois la porte du "section officer" suivie d'une porte avec l'inscription du directeur. Juste devant moi, j'ai vue sur un bureau, ici se trouve le gardien de sécurité, il me surveille attentivement. Une caméra est suspendue au-dessus du cadre de la porte, je vais donc devoir me tenir tranquille et ne pas faire de scène car tout est surveillé. 

Une première fonctionnaire vient s'asseoir à côté de moi. Elle me demande gentiment mon numéro de dossier. Je la regarde sans comprendre : je n'ai pas de numéro de dossier, personne ne m'en a jamais parlé, même pas Ray of Hope, le service d'adoption belge qui m'a amené en Belgique - avec ce service, j'ai l'impression de devoir faire le travail de réflexion moi-même car tout est si lointain que je ferais mieux d'abandonner la recherche.

Il me faut une minute avant de réaliser que je n'ai pas la bonne personne devant moi. Elle s'occupe clairement des dossiers d'adoption d'enfants. Je la remercie gentiment pour son offre et lui demande à qui je peux parler pour répondre à mes questions. Elle se lève et va chercher une nouvelle collaboratrice. Je lui raconte mon histoire et lui donne une lettre officielle avec mes coordonnées. J'exige un tampon de réception, même si elle affirme que ce n'est pas nécessaire, je campe sur mes positions. Mais elle aussi ne lâche pas prise : je dois envoyer un e-mail avec encore une fois toutes les données énumérées. Elle inscrirait alors mon dossier dans les prochains jours et soutiendrait officiellement ma recherche. Je suis curieuse de savoir ce que cela signifie exactement. Étonnamment, je reste calme, je peux parler à la dame avec respect. Elle disparaît avec ma lettre, revient avec le document tamponné et je prends une photo en guise de preuve qu'ils l'ont reçue. Cela me permet de savoir qu'ils sont obligés de ne plus laisser traîner mon dossier. J'ai déjà envoyé des e-mails par le passé, mais je n'en ai jamais reçu de confirmation. Je reste assise une heure sans suivi avec l'idée que la collaboratrice s'occupe entre-temps de l'enregistrement. Elle passe par hasard et me demande si elle peut encore faire quelque chose. Je prends mon courage à deux mains et lui dis que je veux encore parler au directeur avec en tête : qui ne tente rien n'a rien. Elle rechigne, mais je ne me dégonfle pas. Je reste aimable mais ferme. Elle vérifie le bureau et me dit qu'il est parti. Je lui dis gentiment que ce n'est pas grave, et que je vais attendre. L'heure que j'ai perdue entre-temps ne compte pas si je peux quand même expliquer mon cas au directeur. Après sa pause de fin d'après-midi, le directeur arrive et je peux entrer quelques minutes. Je lui explique brièvement pourquoi je suis en Inde et que j'aimerais parler de l'impact de l'adoption. Il me dit qu'il n'a pas le temps pour cela et que je dois faire une demande officielle pour en parler. Il veut dire par là qu'une personne d'une institution officielle belge doit annoncer ma visite, en précisant ce que je viens faire et pourquoi. La bureaucratie en Inde est plus importante que le but ultime, à savoir la sensibilisation de la société à l'adoption. Je sens que c'est inutile d'insister et je remercie le directeur pour son temps. 

Je passe devant le garde de sécurité, salue les écureuils dans la cour et j'atteins la sortie. Je prends une grande inspiration et j'expire. Ma gorge est sèche, mais je ressens quand même un soulagement. Je n'ai pas pleuré, je n'ai pas crié. Je suis restée raisonnable et j'ai pu dire ce dont j'avais besoin, ce que je n'avais pas pu faire lors des précédents voyages. Je grandis, je gagne en confiance en moi et j'essaie d'avancer à mon rythme et à mon niveau. Je me félicite et je décide d'aller faire un tour avec Tine à Laxmi Nagar. Une conclusion bienvenue à une journée utile et enrichissante.

Ondertussen loop ik een flinke verkoudheid op, de onzuivere lucht van New Delhi heeft me in haar greep…

31. En route – 25/02/2024

Vendredi 23 février, juste avant de partir au travail, j'apprends de mon amie du sud qu'elle ne pourra pas venir à New Delhi en raison d'un décès dans la famille. Je comprends sa décision, mais mon corps passe en mode stress. Comment puis-je partir sans avoir réservé de place pour dormir ? L'hôtel qu'elle avait repéré n'était accessible qu'aux citoyens indiens et comme l'Inde n'accepte pas la double nationalité, je ne pouvais donc pas y séjourner seule.

Je pars au travail avec beaucoup d'inquiétude. Je sens que l'enseignement me distrait un peu, mais quand je rentre à la maison à midi, je commence à chercher une place pour dormir comme un poulet sans tête. Entre-temps, j'ai contacté plusieurs Indiens, mais aucun ne me donne une idée concrète de la sécurité du quartier et de la qualité de l'hôtel/guesthouse. Je réserve donc une chambre d'hôtes, à l'aveuglette. Cela me donne une certaine tranquillité d'esprit.

Je tiens à aller manger quelque chose avec ma famille avant de partir. Nous profitons tous de ce moment. Je mange encore un plat typiquement belge car pendant les 2 prochaines semaines, je vais savourer ma cuisine indienne préférée.

Samedi matin, je me lève tôt, je prends une bonne douche chaude et je suis prête juste à temps. Nous arrivons une heure trop tôt à l'aéroport de Zaventem. A ce moment-là, une connaissance indienne m'appelle. Ma chambre d'hôtes se trouve dans un quartier peu sûr et il m'a trouvé un meilleur hôtel. Ouf !!! Je le remercie mille fois. L'enregistrement, le contrôle de sécurité et l'embarquement se déroulent sans problème jusqu'à présent. J'espère qu'il n'y aura pas de problèmes de bagages cette fois-ci, comme lors des deux voyages précédents.

Au moment où je m'installe effectivement dans l'avion en direction d'Helsinki, mes larmes montent. Mon corps est comme d'habitude ballotté d'un côté à l'autre : le besoin de partir et de me ressourcer est grand, mais la douleur de laisser mes chers trésors derrière moi est tout aussi grande. Mon estomac se serre, mais je me ressaisis et regarde par la fenêtre. Là, je vois quelques faibles rayons de soleil tomber sur la tour de contrôle de l'aéroport. Une belle image qui réchauffe mon cœur.

Rayons de soleil illuminant légèrement la tour de contrôle

En route, j'écris dans mon journal et pendant le vol vers l'Inde, je suis traitée comme une vraie Indienne. Je ne reçois même pas de formulaire d'immigration car il est réservé aux Européens (blancs). Nous atterrissons à New Delhi avec une demi-heure de retard, à 6h30 heure locale. Mon corps est fatigué mais il reçoit un coup de pouce dès que je pose le pied sur le sol. Je connais ce processus, il ressemble à une décharge électrique qui me recharge complètement. Je continue courageusement et je prends le chemin sans le tapis roulant. Au service d'immigration, il y a eu un investissement sérieux selon les normes indiennes. Il y a des tables avec des formulaires d'immigration et des stylos. Je suis surprise de voir cela si bien présenté. Avant, il fallait aller chercher les feuilles. Mais l'euphorie s'estompe partiellement quand je découvre que les stylos ne fonctionnent pas. Je prends mon propre stylo et je remplis le formulaire. Le temps d'attente au bureau d'immigration est de 0 seconde pour une fois, je n'ai jamais vu ça. Avant même de m'en rendre compte, je suis prête à organiser mon taxi prépayé. Un moyen pratique de quitter l'aéroport.

Atterrissage au lever du soleil

Plus loin, le chauffeur m'attend mais c'est encore une fois un peu stressant, car l'adresse est apparemment introuvable. Après de nombreux appels téléphoniques entre ma connaissance, l'hôtelier et le chauffeur, je descends finalement au Fabhotel. Cette chaîne d'hôtels trois étoiles propose des nuitées abordables. En termes d'hygiène et d'équipement, c'est tout à fait correct ici.

Je fais une petite sieste et je sors en après-midi : recharger mon numéro de téléphone indien, manger seule pour la première fois et prendre un tuk-tuk pour le centre de New Delhi. Tout cela demande un peu d'aide aux gens gentils qui m'entourent, mais cela a conduit à une belle journée où je réalise finalement que je suis capable de plus que je ne le pensais. Dans mon pays d'origine, je me sentais souvent comme une petite fille, maintenant mon enfant intérieur grandit enfin et je peux me permettre de me mettre dans ma propre peau (d'adulte).

Je termine la journée par un moment délicieux en compagnie de Tine, une autre adoptée, et nous discutons de nos nombreuses aventures dans le sous-continent indien. Je me sens la bienvenue, je me sens entourée, j'ose m'informer, j'ose passer à l'action. Bref, l'Inde est un peu plus à mes pieds. Je suis (bien) en route.

Connaught Place, le cœur commercial de New Delhi

30. Adoption Awareness Month – November 2023

Le mois de novembre est le mois de l'adoption. Mais d'où vient exactement cette idée?

À l'instar de diverses influences venues d'outre-mer, le Mois de la sensibilisation à l'adoption est une idée qui a vu le jour en Amérique. Au départ, l'idée a été lancée pour promouvoir l'adoption. En 1976, le gouverneur (du Massachussets) Michael Dukakis a annoncé la toute première semaine de l'adoption. Le président Ronald Reagon a soutenu la semaine de l'adoption pour la première fois en 1984. Le président Clinton l'a rebaptisée "Mois de l'adoption" en 1995. L'adoption peut être belle, mais les faits ou observations suivants peuvent également être pris en considération.

  • 50000 enfants sont adoptés en Amérique chaque année depuis 2014https://www.daysoftheyear.com/days/adoption-month/)
  • Même le site web de la Maison Blanche met en avant le Mois de la sensibilisation à l'adoption. Le président Joseph R. Biden Jr proclame officiellement le mois de novembre "Mois national de l'adoption".

Qu'apporte ce mois de sensibilisation à l'adoption en Belgique ?

En 2022, Opgroeien (ONE en Flandre) a organisé de nombreuses réunions pour examiner comment accroître la sensibilité à l'adoption. Il a alors été question d'activer le Mois de la sensibilisation à l'adoption en Belgique, qui ne serait pas une promotion de l'adoption mais plutôt un exercice de sensibilisation où l'attention serait également attirée sur le côté sombre de l'adoption. Les organisations d'adoption telles que Steunpunt Adoptie, Opgroeien, les services d'adoption et les groupes d'intérêt en matière d'adoption pourraient unir leurs forces. Jusqu'à présent, il ne s'agit que de mots écrits dans un rapport. Peu d'actions ont été coordonnées jusqu'à présent. Une goutte d'eau dans l'océan ?

Comment est-ce que je m'en sors et qu'est-ce que mon histoire d'adoption m'a apporté cette année ?

Cette année, je suis allée en Inde avec toute ma famille. Certains moments forts et inoubliables ont affiné mon identité et restent gravés dans ma mémoire. Je me souviens du moment où j'étais près de l'arbre à racines (Banian Tree) à Auroville, avec mes enfants. Cela m'a énormément réchauffé le cœur. Un sentiment particulier de connexion s'est emparé de moi. La vue sur l'océan Indien au lever du soleil était également magique. Pouvoir se tenir là avec mon mari ET mes enfants était vraiment romantique. Cela m'a donné un sentiment de reconnaissance, mais surtout de connexion.

Je me souviens également de ma fille en sari, une lueur chaleureuse est partie de mes orteils jusqu'à mon cœur. J'étais et je suis toujours si fière d'elle !

Mes fils m'ont témoigné leur respect et leurs yeux pétillants m'ont fait comprendre qu'ils appréciaient ce voyage extraordinaire.

Je suis heureuse d'avoir participé à cette aventure avec eux. Eux, mon mari et moi-même avons été comblés.

Re-connect with yourself, go back to your birthplace, eventually dismantle lies,

Re-spect yourself, but also respect your cultures, your countries, and your birth mom before she dies.

Love myself? Love Belgium? Love India? Love your family members instead!

I’m An Sheela, I’m worth existing, I’m blessed.

Sources:

https://www.opgroeien.be/sites/default/files/documenten/20221118-bv1-het-verhogen-van-adoptiesensitiviteit.pdf

https://www.childwelfare.gov/topics/adoption/nam/spread-the-word/graphics/

https://www.daysoftheyear.com/days/adoption-month/

https://blog.adoptuskids.org/finding-my-voice-changing-my-story/

Arbre à racines à Auroville, c'est le plus grand arbre de cette sorte en Inde. - février 2023
Photo de connection à la côte (Chennai) - février 2023
Taj Mahal - février 2023

29. India, my love – part I

Une semaine après mon retour d'Inde....

Ce fut une semaine pleine de travail, de va-et-vient et de mauvais temps. Le retour à l'équilibre s'est étonnamment bien passé.

L'Inde était: fantastique, étonnante, stupéfiante, frivole, colorée, joyeuse, chaleureuse, sale, amicale, généreuse, corrompue, ...

Aucun pays n'est parfait, y compris mon pays d'origine. Mais cela n'enlève rien au fait que je suis toujours amoureuse de l'Inde, et l'amour consiste à prendre ce qui est offert, même ce qui n'est pas si bon. Est-ce que j'accepte tout ? Bien sûr que non, mais j'emporte le meilleur avec moi.

Qu'est-ce qui a rendu ce voyage si spécial?

C'était notre premier voyage en famille. Comme les enfants étaient au cœur de ces vacances, nous n'avons rien planifié à l'avance. Nous avons décidé qu'ils nous aideraient à donner le rythme et à choisir les excursions. C'était très excitant pour moi, car les gens qui me connaissent bien savent que je suis une "miss organisation". Tout doit être préparé dans les moindres détails pour moi, sinon cela ne fonctionnera pas, et c'est ainsi que j'ai pu garder le contrôle de la situation pendant des années.

À notre arrivée à l'aéroport de Zaventem, nous avons appris qu'Aviapartner, le bagagiste, était en grève. Notre voyage commençait déjà avec le premier obstacle. Nous avons réussi à rassurer les enfants et nous nous sommes enregistrés. Le voyage aller s'est par ailleurs bien déroulé, si ce n'est que l'administration des bagages s'est mal passée. Prendre l'avion était nouveau pour mes deux plus jeunes enfants. Le fait que je sois assise entre eux leur a donné un sentiment de sécurité. Je n'avais pas pu expérimenter cette proximité pendant un certain temps en raison de ma crise d'identité.

Lorsque nous sommes arrivés à Chennai, notre patience a de nouveau été mise à l'épreuve lors de la migration. Le plus souvent, la machine à prendre les empreintes digitales ne fonctionnait pas, ce qui n'a pas vraiment permis de raccourcir la file d'attente. Dans la salle chaude et avec nos bagages à main à nos pieds, nous avons bavardé avec un guide touristique. Cela nous a permis de passer le temps. Après la migration, nous avons dû attendre à nouveau pour déclarer nos bagages perdus. Les enfants se sont assis sur les sièges et nous avons essayé d'accélérer la procédure, ce qui n'a pas vraiment été le cas. Une heure plus tard, nous ne pouvions que sortir. Heureusement, nos amis nous attendaient patiemment. Des couronnes de fleurs ont été apportées et placées autour de notre cou. Nous n'aurions pas pu imaginer un plus bel accueil. Les enfants étaient rayonnants et se sont immédiatement sentis accueillis et à l'aise.

Nous sommes partis en jeep pour la maison de notre bonne amie Nandhini. En chemin, nous nous sommes arrêtés pour déjeuner et les enfants ont découvert sur place le premier plat indien typique: le dosa. Ils ont aimé et ont mangé avec leurs mains pour la première fois. Une expérience inoubliable enrichie, nous avons continué notre route. Arrivés à la grande porte, des dames nous attendaient. Avec une lampe à huile et des poudres colorées, elles nous ont accueillis: nous avons été bénis avec cette poudre rouge et jaune. Quel geste chaleureux encore!

Nous nous installons et nous reposons, car nous n'avons pratiquement pas dormi de la nuit dans l'avion.

Après quelques heures, nous nous sommes dirigés vers le centre commercial. J'ai été émerveillée par la splendeur des magasins : Chennai n'est pas si différente de ma ville natale flamande d'Aarschot. Nous avons acheté de quoi passer les premiers jours, car nos bagages étaient restés en Belgique.

Au cours du dîner, nous avons discuté du lendemain. Celui-ci promettait d'être émotionnellement difficile pour moi : une visite sur la tombe du père Suresh, décédé d'un mauvais covidage en 2021. Mon estomac s'est contracté, mes intestins se sont comprimés, le chagrin était encore très palpable. Et les enfants? Ils étaient impatients de venir. Ils ont eu le choix et ont saisi l'occasion. J'étais heureuse de leur choix. Ce grand homme méritait notre bénédiction pour son engagement en faveur de l'éducation des intouchables. Aujourd'hui, Presque 20 ans plus tard, une génération de dalits a été éduquée, ils travaillent souvent dans de meilleures conditions et peuvent ainsi sortir de la pauvreté. Un beau projet qui me tient à cœur, car au fond de moi, je me sens dalit* d'origine.

*Dalit: Le système indien des castes a été officiellement aboli. Il s'agit d'une classification sociale de la population où les dalits font partie des sans-castes, c'est-à-dire qu'ils ont moins de droits ou presque par rapport aux groupes de population classés plus haut qu'eux. Ils ne sont donc pas inclus dans la structure sociale de la population.

Accueil à Chennai (Aéroport)

28. DNA

Après mon dernier voyage, j'avais besoin de temps pour récupérer. Le temps guérit, apporte des conseils et détermine le rythme. Voici mon texte sur ce qui s'est passé pendant les derniers jours avant mon retour en Belgique.

Ma première semaine en Inde a été fantastique. Le fait d'être là avec mon fils m'a apporté un équilibre différent de celui que j'avais pu connaître auparavant. Me sentir sa mère a été magnifiée, mais ma vulnérabilité est également devenue très visible et tangible pour lui.

À la fin de cette première semaine, j'ai rencontré une personne qui m'a orientée vers un politicien de Muzaffarpur et qui m'a fixé un rendez-vous avec lui. Le jour suivant, nous sommes allés chez le "mukhajee". Je m'étais préparé à une conversation aléatoire au cours de laquelle je lui expliquerais pourquoi je cherche ma mère et l'impact de l'adoption. Quand nous sommes arrivés, nous avons été accueillis par une armée de cinq hommes. Surprise mais aussi un peu incertaine, je me suis avancée vers eux avec mon fils et un ami. On nous a proposé des sièges. Bientôt, un homme a commencé à appeler des personnes avec son gsm. Il a prétendu me reconnaître sur ma photo de passeport. Une famille du village aurait perdu une sœur à cause des circonstances pendant la période où j'avais disparu. Avant que je ne le sache, cinq autres hommes se tenaient autour de nous. Ils sont arrivés, à intervalles de 10-15 minutes chaque fois. Je ne savais pas du tout ce que je devais ressentir, penser et encore moins faire. Mon fils aussi vivait la situation dans une confusion totale. La famille m'a invitée à célébrer avec eux la chhath puja, le rituel hindou de l'année dans le Bihar. Comme mes émotions prenaient le dessus, j'ai d'abord accepté, mais j'ai indiqué qu'une nuitée ne serait pas possible. Ce rituel dure normalement trois jours. Après les 5 hommes, une vieille dame s'est également jointe à la fête. Elle avait l'air très ignorante et je n'ai pratiquement ressenti aucune émotion avec elle, comme avec le reste des membres de la famille d'ailleurs. Par la suite, lorsque la glace a été quelque peu brisée, elle a affirmé qu'elle se serait occupée de moi lorsque j'étais un bambin. Je n'ai pas vraiment compris et je me suis laissée guider par les ondes positives qui étaient dans l'air à ce moment-là: une famille indienne qui me reconnaissait et qui voulait m'accueillir ! C'était une expérience incroyable pour moi.

On nous a emmenés dans une belle maison et on nous a servi de la nourriture ainsi que des bouteilles d'eau. Nous étions littéralement portés sur leurs mains. Après le repas, il était temps de se détendre. Une petite pièce avait été dégagée pour nous et nous avons commencé à analyser la situation. J'ai demandé à un ami de la famille indienne de dessiner un arbre généalogique. Les noms des membres de la famille sont sortis sans problème mais les âges ont été littéralement jonglés. Mon fils a attiré mon attention sur ce point et j'ai commencé à avoir des doutes. L'histoire de cette famille a montré que mes parents étaient déjà morts. Je n'ai pas et ne pouvais pas encore considérer cela comme vrai. Finalement, nous avons décidé de rentrer à Patna et de revenir le lendemain pour le rituel.

Sur le chemin de Patna, j'ai craqué, mon fils s'efforçant de me tirer de mon chagrin. Je me suis sentie coupable envers lui, mais aussi complètement perdue. Que devais-je penser de cette situation? J'ai appelé un ami en Belgique qui m'a écouté sans jugement. Ça m'a fait beaucoup de bien. Alors que nous traversions le pont sur le Gange, j'ai dit à mon fils: "Chéri, dans cette quête, je ne suis sûr de rien, mais ce dont je suis sûre, c'est que tu es mon fils, et que je t'aime de façon incommensurable." Ces mots me donnent la chair de poule, même encore aujourd'hui. Ce fleuve la Gange que ma mère a traversé pour me déposer à l’orphelinat de Patna. Le symbolisme, la douleur mais aussi la beauté de l'amour peuvent être si significatifs. Le soir, j'ai décidé de mettre les événements de côté pour un moment, en profitant du dîner et de la compagnie de mes amis.

Le lendemain, nous sommes allés rendre visite à l'ami qui avait donné le numéro du Mukhajee. Pendant la conversation, le "mukhajee" m'a appelé. J'ai relayé l'appel à mon ami et il a compris que la famille était convaincue que j'étais leur sœur disparue. Il n'y avait pas d'autre option que de faire un test ADN. J'ai accepté et mon ami m'a accompagnée les jours suivants : trouver le bon test ADN, persuader la famille de venir au laboratoire, le coût, ... Toute ma deuxième semaine y a été consacrée, car dans la culture indienne les rendez-vous sont souvent reportés, et parce que je voulais revérifier toutes les informations qui me parvenaient... La veille de mon départ pour la maison, nous avons pu recevoir la famille à Patna. Le trajet jusqu'au laboratoire a été désagréable, on ne s’est Presque pas parlé. Sur le chemin du retour, cependant, il y a eu des discussions et même des larmes ont coulé lorsque nous nous sommes dit au revoir. La culture masculine, autrement sérieuse, a maintenant montré une certaine sensibilité. J'ai laissé libre cours à mes émotions, sans savoir si je reverrais cette famille un jour.....

15 novembre 2022. Je me réveille avec le nez bouché, la gorge sèche et un mal de tête. Aller au travail n'est pas possible aujourd'hui. Je ne me sens vraiment pas bien dans ma peau, et ça ne m'arrive pas souvent. Les microbes présents dans mon corps y sont évidemment pour quelque chose. Mais il y a aussi un malaise. La première fois depuis que je suis rentré de deux semaines en Inde. L'agitation, pour quoi exactement ?

Vers 8 heures du matin, je reçois un courriel, de l'Inde! Tout à coup, je suis bien réveillé et je me concentre sur la lecture du contenu. Mon cœur bat déjà à tout rompre et pendant un moment, je ne sens pas non plus mon mal de gorge. Ma tête est en train d'exploser. Les chiffres dansent devant mes yeux. Et mes yeux se déplacent en diagonale sur le document: fratrie, analyse, ADN... Soudain, mes yeux se posent sur les mots "An Jacobs et N. sont apparentés en tant que frères et sœurs". Whouah! Mon corps s'emballe, et mes intestins se contractent. Je pleure de bonheur: youpie! J'ai trouvé ma famille! Je ferme les yeux, et je me laisse flotter dans mon petit monde, l'Inde ensoleillée, Muzaffarpur, les litchis, la rivière Gandak, ... Mes larmes coulent sur mes joues.....

Quelques instants plus tard, un anti-climax s'empare de moi lorsque je me réprimande et me force à lire l'ensemble du document avec calme et attention. Je regarde attentivement les chiffres, qui ne me disent pas grand-chose pour l'instant. Puis j'arrive à la conclusion et je lis la phrase complète avec consternation: "Ce cas a été évalué pour fournir la preuve que An Jacobs et N. sont apparentés en tant que frères et sœurs". Une confusion totale m'envahit. Je continue à lire et je me rends compte que le test ADN est négatif. Mon euphorie est remplacé par un bouleversement total. Entre-temps, mon mari est rentré et je lui communique l'information. Il confirme qu'il n'y a aucun lien avec la personne qui a effectué le test ADN en Inde. Mon chagrin est indescriptible. Pourtant, mon amant me tire du gouffre. De lui, je sais qu'il est et sera toujours là pour moi. Sa vision rationnelle est la bienvenue ici pour un moment. Je ferme mon ordinateur et je descends. Nous prenons le petit-déjeuner ensemble et je vide mon bol de flocons d'avoine chauds. Ma tasse de thé, je la bois à petites gorgées. Mon regard se fixe au loin, dans le néant. Cela me rappelle ma photo de couverture sur Facebook. Moi, petite bambin, nouvellement arrivée en Belgique, regardant anxieusement devant elle, complètement déprimée et ne comprenant pas ce qui va se passer. Même maintenant, pendant un moment, je ne sais pas quelle sera la prochaine étape. Je décide de ne rien faire aujourd'hui. Et de laisser tout être pour un moment....

Quelque part, entre Muzaffarpur et Patna

27. Ludos & échelles

3/11/2022

Hier, nous avons rendu visite à mon ami brahmane et sa femme. Je voulais leur dire au revoir avant de reprendre l'avion pour la Belgique. En chemin, la voiture de mon autre ami est tombée en panne. Le moteur a calé. Heureusement, nous n'étions pas sur un carrefour très fréquenté, mais quand même. Les klaxons des conducteurs derrière nous ne s'arrêtaient pas. Phineas et moi avons littéralement poussé la voiture sur le côté. C'était une aventure en soi. Ça m'a rappelé le trajet en voiture vers Muzaffarpur samedi dernier. Sur le chemin, nous avions été arrêtés par des hommes. Le conducteur avait dû s'arrêter. Notre chauffeur était sorti et après 10 minutes de discussion, je ne comprenais toujours pas ce qu’il se passait. J'ai quitté la voiture avec Phineas et nous avons rejoint les hommes en train de discuter. Là, nous avons enfin compris de quoi il s'agissait. La société pour laquelle travaille notre chauffeur n'avait pas payé la dernière tranche du prêt (de la voiture). J'ai demandé comment ils pouvaient vérifier cela. Il s'avère donc qu'il existe une application sur les smartphones des contrôleurs. Ils scannent un code spécial sur la plaque d'immatriculation de la voiture, qui leur donne accès à la base de données des prêts. J'étais abasourdie par le fait que ce système, aussi moderne soit-il, existait dans une ville défavorisée comme Muzaffarpur. Quoi qu'il en soit, j'avais encore appris quelque chose.

Revenons à la panne de la voiture de mes amis. Après avoir écarté la voiture en toute sécurité, ma camarade est allé au magasin. Elle est revenue avec une bouteille d'eau. Qu'est-ce qu'ils allaient faire avec ça? Eh bien oui, en Inde, c'est simple: le liquide du radiateur s'était épuisé, alors on ajoute un peu d'eau, on attend 10 minutes et presto, on est reparti. Phineas a trouvé que c'était une aventure fantastique. Il ne l'oubliera pas de sitôt.

Chez nos amis brahmanes, nous avons été chaleureusement accueillis et on nous a servi un plat typiquement hindou dont j'ai déjà oublié le nom. Il avait une saveur fraîche mais en même temps sucrée, salée et épicée. Bref, une explosion de saveurs a envahi ma bouche. J'ai adoré, pour Phineas c'était malheureusement trop épicé. Pour le dessert, nous avons eu les très connus jalebis, un délice et une fête pour mes papilles. J’en profite à fond, vraiment.

Un appel téléphonique important interrompt notre moment de convivialité. Les plans pour le lendemain tombent à l'eau. Je suis au plus bas. Mon ami me calme en disant qu'il y aura une autre chance le jour suivant. Je m'accroche à cette paille. Nous parlons après, et la conversation prend une tournure différente. Nous sortons également un jeu de société: les ludos et les échelles. Ça ne pourrait pas être plus approprié. Un jeu de hasard dans lequel on est renvoyé au départ par un serpent, c'est ce que je ressens dans ma quête aujourd'hui. La métaphore me plaît. Après le match, je retrouve un peu de courage. Nous décidons de passer la nuit avec cette famille, car se déplacer dans l'obscurité, sans guide supplémentaire, n'est pas quelque chose que nos amis apprécient. Apparemment, la sécurité reste un problème. Pourtant, j'ai le sentiment que nous avons déjà entrepris plus de choses que lors de mon dernier voyage. Pendant notre séjour actuel, par exemple, nous nous sommes déjà promenés sur le marché le soir, alors que cela serait plus difficile avec une personne à peau claire en notre compagnie.

La nuit chez notre famille brahmane est très reposante, pour une fois pas de musique à fond dans notre chambre. Je dors comme une rose jusqu'à 9h30 du matin, me sentant un peu timide. Nous prenons un petit-déjeuner tardif, jouons aux échecs, discutons ensemble de la culture hindoue et planifions la journée du lendemain. A cause du déjeuner tardif, nous ne mangeons pas avant 14h30. Après avoir mangé nous prenons un taxi pour retourner chez mon amie. Je la rassure en lui disant que tout est sous contrôle. Le soir, nous nous promenons ensemble sur le marché, avec Phineas qui nous emboîte le pas.

Nous prenons notre temps, essayons d'évacuer les frustrations et de nous concentrer sur le slogan de mon ami: "Don’t worry, be happy!” Nous mettons tout en œuvre pour notre recherche, ce n'est pas facile parfois, mais nous espérons que tout va s'arranger....

Anty – partie 2

Je descends du véhicule suivi de près par le chauffeur. Je salue les trois hommes en disant: “Namaste, happy chhath puja”. On tend une chaise à chacun d’entre nous. Nous nous installons en forme de demi-cercle sous l’arbre à litchis. Le ‘guru’ du village, un homme avec une très grande moustache, prend la parole en premier, il commence la réunion avec une prière dédiée au soleil. Je me laisse emporter par l’atmosphère que dégage ce rituel et je sens qu’une espèce de chaleur m’envahit. Cette chaleur part des mes orteils et au fur et à mesure de la prière, se répand à travers tout mon corps. Soudain, je sens une sensation de brûlure au niveau de ma cuisse gauche, à cet endroit se trouve une cicatrice. Je la dois à un vaccin que j’ai reçu en Inde quand j’étais encore qu’une petite fille. Cette douleur, je la sens aussi sur mon bras droit, c’est à cet endroit que je me suis brûlée en sortant le pain du four. Je me demande ce qu’il se passe. Un deuxième homme se met à réciter des mantras sans s’arrêter tandis qu’un troisième frappe un gong énorme. C’est comme si j’étais en train de m’endormir, les mots n’arrivent plus à sortir de ma bouche. J’ai l’impression de planer.

Mijn moeder en ik zijn onderweg. Ik zie een paardenkop op en neer bewegen en hoor het dof geluid van de hoeven die op het zand neerkomen. Ik lig in de armen van mijn moeder en kan net piepen over haar arm. Ik vang een glimp op van water en in de verte zie ik de schoorsteenpijp in het landschap, zo eentje van een baksteenfabriek. Ik wieg mee met het ritme van de kar. Mijn moeder fluistert in mijn oor dat ze van me houdt. Ik kruip dicht tegen haar aan. En voordat ik het weet vallen mijn ogen dicht.  In mijn droom zie ik mijn vader, al dansend in de laadbak van een vrachtwagen, hevig roepend op het ritme van de chhath puja muziek. Plots kantelt het voertuig. De muziek stopt abrupt en mijn ogen zoeken angstig naar mijn vader. Er komt geen beweging. Het beeld vervaagt en ik word wakker. Ik huil en mijn moeder sust me. Haar stem heeft een kalmerende werking op mijn ganse systeem. Mijn blik gaat naar het meisje naast haar. Ze lijkt op me.

“Anty, Anty! Pourquoi tu pleures autant?”. J’essaie de me coller le plus possible à elle et je lui chuchote que je l’aime et qu’elle est en sécurité avec moi. Heureusement, elle s’endort en un instant. Laksmi est assise à côté de moi, elle joue avec un bâton. Je la tiens à l'œil. Un homme avec une peau blanche nous frôle avec son vélo. J’en avais déjà entendu parler mais je n’en avais jamais vu. Qu’est ce qu’un homme blanc venait faire ici, en plein milieu de la campagne indienne? Nous nous arrêtons à quelques lieues de là, je descends et rejoins une petite forêt avec mes enfants. Après avoir passé un bon moment avec mes deux filles, je ressors du bois et j’ai l’impression d’être observée. En effet, à la sortie du bois se tient l’homme que nous avions croisé plus tôt. Il me fixe et je me sens mal à l’aise. Il m’adresse la parole en Hindi: “Vous voyagez seule avec vos deux enfants?”. Je fais mine de ne pas avoir entendu sa question et, déterminée, me dirige vers la charrette. Malgré cette détermination je sens une main agripper mon bras. Il continue: “Je peux vous aider, je peux vous protéger". Je fonds en larmes, c’est trop pour moi. Je lui explique que je fuis la maison pour sauver mes enfants.

Cette belle femme qui porte un saree vert avec des bordures jaunes attire mon attention. Elle est assise dans une charrette tirée par un cheval. Pendant que je la regarde, je frôle le cheval, je suis déstabilisé mais j’arrive tout de même à reprendre mon équilibre d’un coup de guidon. Je continue et décide de m’arrêter 2km plus loin pour boire un verre. Je m’installe dans un petit salon de thé et profite de la savoureuse boisson que j’ai commandée. J’aperçois le cheval qui m’avait déstabilisé 2km plus tôt. Les passagers de la charrette descendent et je vois la dame au sari vert tenant un bébé dans ses bras. Une petite fille marchait à côté d’elle. Elle disparaît, je termine mon thé et curieux comme je suis, je décide d’aller voir où elle est passée. Elle réapparait comme elle avait disparu. Qu’elle est belle. Je me demande si je devrais lui adresser la parole. Je suis tenté…

Anty  – 1

Pour des raisons personnelles, j'ai écrit cette fois une histoire basée sur des faits réels et sur la fiction.

Anty ouvre un œil, puis l'autre. La musique envahit ses oreilles. Elle se frotte les yeux et secoue la tête. Elle s'étire. Elle n'a pas vraiment envie de se lever seulement, elle a un rendez-vous important aujourd’hui. Elle se hisse hors du lit, se rafraîchit et s'habille.

En bas, elle savoure un bon petit-déjeuner: idli avec une sauce aux légumes. Il n'y a pas de viande pour le moment, le festival interdisant cette nourriture pendant plusieurs jours. Elle sirote un chai masala, le traditionnel thé indien. Ensuite, elle se brosse soigneusement les dents et, le gout de menthe encore en bouche, se dirige vers la voiture qu’elle avait louée la veille. Anty s'installe confortablement dans celle-ci, des petites bêtes grouille à ses pieds. Elle a soudainement envie d’être comme elles, le plus petit possible. Après une demi-heure de route, son téléphone sonne. La personne à l'autre bout du fil l'exhorte à accélérer, car la réunion ne sera pas organisée une deuxième fois. Un goût nauséabond envahit sa bouche, il ne reste rien de la saveur de la menthe. Elle avale, espérant obtenir un goût plus neutre dans la bouche. Elle y parvient à peine. Elle se concentre alors sur autre chose: l’environnement. Elle regarde par la fenêtre et observe le paysage qui défile devant elle. La vallée verte de la rivière sacrée la fait rêver. Elle rêve de son passé:

Allongée dans les doux bras de ma mère , je sens sa main qui carresse ma joue. Je me sens en sécurité près de sa poitrine. En me tortillant lourdement, j'essaie de déplacer ma bouche vers son sein, quand je trouve son mamelon, j'aspire son lait maternel à grands coups. Me sentant comblé, je m'endors sur ses genoux. Je dors paisiblement et ne remarque pas qu'elle m'a allongée sur un tapis en osier sur le sol.

Que diable suis-je censé faire? Ce mal de tête incesssant me rend folle. Je vais aux toilettes et je remplace les chiffons qui sont censés arrêter le saignement. La douleur dans le bas du ventre est insupportable. Les effets de l'accouchement se font encore sentir. Ma petite fille, elle est venue au monde hier. Pourquoi fallait-il que mon enfant soit une fille? Tout au long de ma grossesse, je n’ai cessé de prier pour que ça soit un garçon. Pourtant, je suis connectée à ma petite princesse, elle est si belle, si parfaite. Elle est mon petit miracle, mon tout. Bien que le père de ma fille ne soit pas heureux de sa naissance, je me suis battue avec acharnement pour la garder. Je vis cachée chez une amie à quelques villages d’où vit mon mari. Elle nous protège, moi et ma chère Anty. Je retourne à la cabane qui me sert de maison provisoire, et me blottis aux côtés d'Anty allongée sur le tapis. Il n'y a pas beaucoup de temps pour se reposer.

Plusieurs jours passent, et j'essaie de me concentrer sur le soin de ma fille. Elle grandit lentement mais ses yeux sombres brillent. Un jour, je remarque qu'elle essaie de sourire. Je lui rends son sourire. Mon lien avec elle est étroit et se resserre de jour en jour. Et si je m'enfuyais avec elle?

Anty est catapultée dans le présent par une violente secousse. Elle est écrasée contre son siège après un brusque coup de frein du conducteur. Son cœur fait un bond et bat encore à cause du choc. Anxieuse, elle regarde à travers le pare-brise et remarque un motocycliste allongé sur le sol. Des cris et des hurlements se font entendre, malheureusement dans une langue qu'elle ne connaît pas. Les passants le relèvent et, après quelques tapes sur l'épaule, il remonte sur son deux-roues et s'en va. Le chauffeur poursuit sa route jusqu'à ce qu'un grand bâtiment blanc, entouré de palmiers et de litchis, se dessine. Des hommes nous attendent à côté d'une grosse jeep noire.

A suivre.

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